Nous avons parlé avec Abdoul Salam Koussoubé à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso. Nous nous étions rencontrés le 9 janvier 2025 à Caracas, lors du Festival Mondial Antifasciste qui s’est tenu du 9 au 11 janvier 2025, où nous avons établi un premier contact.
Ce texte est un résumé de notre entretien. Vous pouvez visionner l’intégralité de la discussion (30 minutes avec des sous-titres en néerlandais) dans la vidéo YouTube ci-dessous.
Cliquez sur les codes temporels:
00:00 Introduction de Abdoul Salam Koussoubé
01:17 Pourquoi un Centre Thomas Sankara en 2025?
07:50 La révolution de 2022 avec le capitaine Ibrahim Traoré
13:07 “Le président MAcron, un mal nécessaire pour l’Afrique”
23:08 Souveraineté économique, sociale et militaire par la coopération de l’AES
29:21 Un message de solidarité et d’amour entre les peuples
Ensemble, nous avons approfondi la révolution du 30 septembre 2022 au Burkina Faso afin de donner une image précise de ce qui se passe réellement là-bas. En effet, les médias ici offrent une vision très biaisée, unilatérale et sélective de cette réalité, vue à travers une lentille occidentale postcoloniale.
Abdoul Salam, pouvez-vous nous en dire davantage sur le rôle de la jeunesse au Burkina Faso dans la préservation de l’héritage de Thomas Sankara ? Est-il encore une figure iconique ? Et pouvez-vous également nous parler du rôle du Centre Thomas Sankara?
(Voir Thomas Sankara : le Che africain assassiné le 15 octobre 1987)

(derrière Koussoubé, mural de l’auteur Sony Labou Tansi)
Abdoul Salom Koussoubé : “Hier, j’ai lu un article sur le Burkina Faso dans un média étranger. Je me suis demandé si cela parlait vraiment du pays où je vis, tant le décalage avec la réalité était grand.”
“Je suis membre du Centre Thomas Sankara pour la libération et l’unité de l’Afrique ainsi que de la section burkinabée du PRTPA (Parti Révolutionnaire de Tous les Peuples Africains).”
“Le Centre Thomas Sankara comprend une bibliothèque révolutionnaire panafricaine avec plus de 300 ouvrages révolutionnaires. Nous y organisons des formations politiques et idéologiques pour sensibiliser la population aux causes de leur situation de vie.”
“Thomas Sankara reste une figure emblématique au Burkina Faso. Lors des manifestations de 2014 contre le régime de Blaise Compaoré, qui avait mis fin à la révolution de 1987 en assassinant Thomas Sankara, le nom de Sankara était sur toutes les lèvres. Des pancartes, des affiches et des t-shirts portaient son image. Cela montre que son influence reste vivante, surtout parmi les jeunes générations.”
(Voir notre dossier Burkina Faso)
“Depuis ces manifestations de 2014, le slogan national instauré par Sankara a été rétabli : “La patrie ou la mort, nous vaincrons”, ce qui témoigne de son impact durable – selon le slogan de la révolution du Cuba: ‘Patria o muerte, venceremos’.”

La jeunesse bourkinabée avec le president Traoré au Mémorial Thomas Sankara. Ils suivent le programme Pionniers du Centre Thomas Sankara. Photo: Centre Thomas Sankara
“D’autres initiatives, telles que le Mémorial Thomas Sankara, des chansons, des films et des pièces de théâtre, perpétuent son héritage, non seulement au Burkina Faso, mais aussi au-delà.”
Explique nous la situation politique actuelle, notamment le coup d’État de septembre 2022 dirigé par le capitaine Ibrahim Traoré.
“Avant cet événement, son parcours était relativement méconnu, mais il est désormais reconnu comme un leader humble et proche de la population.”

4 des 15 états-membres de la CEDEAO rejettent la domination postcoloniale Française. Map: workers.org
“Il marque une rupture avec les élites militaires au sommet de l’armée, souvent déconnectées de la réalité et au service des anciens régimes dictatoriaux. Cela explique également sa popularité auprès de la population.”
“Nous avons également discuté de la présence des armées étrangères dans la région. Malgré les moyens logistiques et technologiques déployés pendant des décennies par les troupes françaises et d’autres forces européennes, elles n’ont pas réussi à lutter efficacement contre le terrorisme au Sahel.”
“Cela a poussé les Africains à remettre en question leur rôle, les considérant davantage comme une partie du problème que comme une partie de la solution.”

Trois passeports AES du Burkina Faso, du Niger et du Mali avec le même emblème. Photo : KAS
“Avec nos propres moyens militaires limités, nous avons réussi à chasser les terroristes et à protéger la population. Et pourtant, la France et l’Europe refusent de nous fournir les outils technologiques nécessaires pour poursuivre ce combat par nous-mêmes.”
“La coopération entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger, qui ont formé l’Alliance des États Sahéliens (AES), constitue sans aucun doute un tournant historique pour toute la région.”